Émile Weppe. La captivité – Du Frontstalag n° 240 de Verdun, au Stalag VI A de Hemer

Chemins croisés. Faits prisonniers, comme des milliers d’hommes, Gilbert Zenner, le premier époux de ma mère, et Émile Weppe suivront des itinéraires différents.

Gilbert Zenner, affecté à la 151ème Cie Auto du Service Sanitaire Automobile, est fait prisonnier le 22 juin à Toul et est interné au Frontstalag n° 162 de Dommartin-lès-Toul (http://www.professeurs-medecine-nancy.fr/Hopital_J_dArc.htm), créé dans l’urgence par les Allemands dans l’hôpital Jeanne d’Arc et dans lequel seront entassés les prisonniers de guerre français « coloniaux ». Il y restera jusqu’à la fermeture de ce Fronstalag, fin mars 1941, et sera libéré atteint d’une tuberculose pulmonaire contractée en captivité. Il est décédé, à l’hôpital de Lens (Pas-de-Calais), le 13 mars 1942, des suites de sa maladie contractée en captivité et du « régime spécial » qu’il y a subi.

Émile Weppe, fait prisonnier le 24 juin, à Thuillez-aux-Groseilles, près de Toul, est, lui, dirigé, à pied, jusqu’à Verdun (80 km) où les casernes Niel, de Thierville et de Jardin-Fontaine sont transformées en Frontsalag n° 240. Dans des dortoirs surpeuplés, infestés de vermines, les PG, sous-alimentés, attendront vainement une libération espérée, jusqu’à  leur départ, en train mais dans des wagons à bestiaux, vers une destination inconnue outre-Rhin. Pierre Bocquet, également fait prisonnier près de Toul, dans le bois de Bocquegney, le 22 juin 1940, soit deux  jours avant Émile Weppe, et emprisonné à Verdun dans la caserne Niel, jusqu’en octobre, a noté l’itinéraire suivi par ce train : Verdun 04/10/40 : 11h10 > Stenay > Sedan 13h55 > Bertrix (Belgique) 18h25 > (Luxembourg) > Trieste > (vallée de la Moselle) > Koblenz-Lutzel 05/10 : 07h45 > Neuwied > Linz > Troisdorf 10h00 > Köln 10h30 > Opladen-Solingen-Ohligs 12h40 > Wuppertall-Elberfeld 13h10 > Hagen > Schwerte (Ruhr) 14h40 > Hemer 16h25. 30 heures de train !

30 heures de train

Itinéraire Verdun-Hemer du 4 au 5 octobre 1940

La gare de Hemer en 1940-1945

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De la gare de Hemer au camp, des milliers de prisonniers de guerre avaient déjà traversé la ville par la Bahnhofstrasse et la Ostenlschlahstrasse (nom actuel). Parmi les premiers Français arrivés, le caporal Tanguy de Courson, d’abord interprète du 10 juin au 3 juillet 1940, a relaté deux ans et demi de sa captivité et des faits de la vie quotidienne des PG du stalag VI A, dans ce récit :  Captivité (par Tanguy de Courson)

Après un court séjour de 3 ou 4 jours au Dulag VI A (camp de passage constitué de grandes tentes installées au nord du stalag VI A), Emile Weppe a été enregistré dans un état des entrées/sorties (Meldung n° 567 du Stalag VI A), sous le numéro 44093. Il a porté, à partir de jour là et pendant toute sa captivité, une plaque signalétique « Stalag VI A – 44093″.

Cette « Meldung » n° 567 du Stalag VI A concerne 200 prisonniers de guerre français. Notamment, on relève, sur la même page, les noms de :

  • Claudius Bacher (°13/10/1904 à St Sauveur-en-Rue), soldat du 248ème RAD, capturé à Toul (54) le 22/06/40.
  • Victor Lemaire (°05/04/1910 à Drocourt), soldat du 27ème RAD, capturé à Toul (54) le 22/06/40.
  • Yvon Malaise (°31/05/1914 à Fresnes), soldat du 27ème RAD, capturé à Toul (54) le 22/06/40.
  • Raymond Watrelot (°26/03/1913 à Anneulin), soldat du 128ème RI, capturé à Allain (54) le 22/06/40.
  • Léon Menut (°01/03/1898 à Paris), soldat du 402ème DCA, capturé à Toul (54) le 24/06/40.
  • Louis Coletta (°05/09/1913 à Pierre-Bénite), soldat du 132ème RIF, capturé à Lérouville (55) le 17/06/40.
  • Jules Boussard (°25/01/1903 à Beuvardes), soldat du 155ème RI, capturé à Apremont-la-Forêt (55) le 18/06/40.

Extraits de la « Meldung n° 567″ du Stalag VI A : 

La plupart des prisonniers de guerre ne faisaient que passer par les stalags, lieux d’enregistrement, d’épouillage, de désinfection et d’affectation dans les détachements de travail (Arbeitskommandos).

Émile Weppe a indiqué sur sa carte postale le numéro de son camp de travail (n° 637) et sa fiche médicale de rapatriement précise son dernier lieu de travail en Allemagne (2805 Meggen).

Carte postale de captivité - verso

Carte postale de captivité - verso

Fiche médicale de rapatriement n° 0868434

Fiche médicale de rapatriement n° 0868434

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Entre-temps, suite à la réorganisation des stalags du Wehrkreis VI, le stalag VI A regroupa, fin 1942, tous les Arbeitskommandos de la Ruhr travaillant dans des mines de charbon et transféra les autres types de Arb-Kdos à d’autres stalags, au stalag VI D notamment, dont ceux de Meggen.

La « Meldung » n° 1644 du Stalag VI A indique ce transfert (administratif) au Stalag VI D de Dortmund, à compter du 10/12/1942.

Cette « Meldung » concerne 212 prisonniers de guerre français. Notamment, on relève, sur la même page, les noms de :

  • Raymond Watrelot (°26/03/1913 à Anneulin), soldat du 128ème RI, capturé à Allain (54) le 22/06/40.
  • Gaston Lethiais (°31/08/1914 à Ecouis), soldat du 35ème RAD, capturé à Toul (54) le 23/06/40.
  • Armand Robert (°26/05/1910 à Paris), caporal du 227ème RI, capturé à Toul (54) le 24/06/40.
  • François Souvignet (°14/09/1914 à La Ricamary), soldat du 248ème RAD, capturé à Toul (54) le 24/06/40.
  • René Nayrat (°21/01/1914 à Carvin), soldat du 155ème RIF, capturé à Nancy (54) le 18/06/40.
  • Alexandre Tentelier (°12/01/1912 à Aix-Noulette), soldat du 160ème RI, capturé à Toul (54) le 22/06/40.
  • Marceau Hanne (°14/05/1912 à Méricourt), soldat du 127ème RAD, capturé à Toul (54) le 23/06/40.
  • Czeslaw Polowczyk (°14/11/1912 en Westphalie), soldat du 100ème RI, capturé à Toul (54) le 25/06/40.
  • Oscar Cresson (°10/06/1914 à Courrières), caporal du 155ème RIF, capturé à St Mihiel (55) le 18/06/40.
  • Ranulphe Hunet (°25/12/1918 à Auchel), caporal du 406ème DCA, capturé à Toul (54) le 24/06/40.
  • Henri Mathieu (°30/01/1914 à Petite-Synthe), soldat du 27ème RAD, capturé à Toul (54) le 22/06/40.

Extraits de la « Meldung n° 1644″ du Stalag VI A : 

♥ ♠ ♦ ♣

Lire la suite : http://www.stalagvia-16032.com/emile-weppe-la-captivite-en-arbeitskommandos/

10 Responses to Émile Weppe. La captivité – Du Frontstalag n° 240 de Verdun, au Stalag VI A de Hemer

  1. MAURIN :

    Bonjour,
    J’ai 69 ans, je viens de retrouver « des papiers » de feu mon beau-père que je n’ai pas connu (dcd en 1966) : DEVIGNES René né le 07 10 1916 à Chigny (02 ), ayant appartenu au 155ème RI, fait prisonnier à Toul le 18/06/1940 (n° 46789), retour dans ses foyers le 05/06/1945.
    NB : Apparemment incorporé (SM) le 01/09/1937 … a vécu ensuite à Saint-Quentin (02100).

    Suis intéressé par des documents ou récits qui le concernerait.
    Merci d’avance.
    JPM16

    • Louis :

      Bonjour Jean-Pierre,
      Avec ça, difficile pour moi de vous communiquer des renseignements ou des récits se rapportant à la captivité de votre beau-père. Vers quel Stalag a-t-il été dirigé (complément de son numéro de PG) ? S’il s’agit du Stalag VI A, alors il aurait été « enregistré » dans l’un des jours suivants après mon père.
      Et avant cela, vers quel Frontstalag ? Fait prisonnier à Toul, comme mon père, mais pas à la même date (le 18 au lieu du 24), il aurait pu être dirigé vers des frontstalags plus proches, soit le n° 162 à Dommartin-lès-Toul, ou le n° 161 à Nancy. Dès lors, son parcours jusqu’en Allemagne aurait été différent.
      À vous de collationner les documents retrouvés avec ceux que vous obtiendrez de vos démarches auprès du BAVCC notamment (voir notre article « Démarches, adresses et liens utiles »).
      Nous en reparlerons si vous le souhaitez.
      Louis

  2. MAURIN :

    Merci Louis pour votre message … ça fait plaisir …
    Comme j’ai sa plaque (avec chaînette), il est bien gravé : STALAG 6 (en chiffre romain )/A et 46789. Par contre sur sa fiche de démobilisation il est inscrit : dernier camp de prisonniers : 6 D,
    Sa plaque de soldat (avec chaînette) porte le N° 1485 LAON.
    … Bonne soirée, JPM1.

    • Louis :

      Bonjour Jean-Pierre (M1),
      Donc votre beau-père a été enregistré au Stalag VI A. Mais il n’y a probablement fait qu’y passer comme la plupart des PG. Comme eux, il était affecté à un Kdo (administré par le Stalag VI A) qui n’était pas probablement pas dans une mine de charbon et ce serait la raison pour laquelle il dépendait du Stalag VI D à sa libération en 1945, le Stalag VI A ne conservant que des Kdos dans des mines de charbon en fin d’année 1942, ses autres Kdos étant transféré à d’autres stalag, principalement au VI D. Ce n’était qu’une mesure administrative, les PG restant généralement dans leur Kdo.
      S’il est rentré dans ses foyers le 5 juin 1946, il a certainement musardé en route, mais ceci est une autre histoire.
      Bonne soirée.
      Louis

  3. HUNET ALAIN :

    Je viens de tomber sur ce site ou j’ai découvert le nom de mon père, HUNET Ranulphe, né le 25/12/1918 à Auchel, caporal au 406ème DCA, capturé à Toul (54), le 24/06/1940. Je suis heureux d’avoir trouvé cela pourriez-vous m’en dire plus sur son séjour, où a t-il était emmené après sa capture, à quel endroit. Je sais juste qu’il a été prisonnier pendant 5 ans.

    • Louis :

      Pour plus d’informations sur sa captivité je vous conseille la lecture de notre article « Démarches, adresses et liens utiles ».
      Pour accéder à cet article plus facilement passez par l’onglet « Plan du site ».
      Bonne lecture et bonnes recherches.

  4. gouju :

    Bonjour monsieur.
    J’aurais aimé savoir à qui je devais m’adresser pour les prisonnier de guerre entrés au stalag IV A sous la Meldung n° 571 et ensuite sous celle n° 1675 au stalag IV D en 1942.
    Merci par avance pour votre aide.
    Merci aussi pour tout ce travail que vous avez fait et qui vous sert à alimenter ce blog « historique ».
    À bientôt.

    Sonia, petite-fille de GOUJU Désiré joseph, prisonnier de guerre.

  5. Hello,
    I am doing research for my third historical novel and attempting to find accurate information regarding the Frontstalag 240 that was located in Verdun during W W 2.

    Can you please tell me if there is a difference between a « Frontstalag » and a « stalag » ?

    Am I correct in understanding that the Frontstalags were located near work-sites that the detainees were sent to ? Were they transported to work during the day, returning to the Stalags at night ?

    Also, were many of the prisoners at stalags then sent on to the concentration camps ?

    I have attempted through my research to ascertain the answers to these questions but am finding conflicting information. If you can clarify, I would greatly appreciate it. Thank you very much.

    Gail Noble-Sanderson

    • Louis :

      Bonjour Gail,

      Je vous réponds en français pour ne pas faire de faute en anglais. Désolé.

      Il y a plusieurs questions dans votre message.

      Un frontstalag (Frontstammlager für Kriegsgefangene) était un camp de prisonniers de guerre situé derrière le front des combats. Souvent installés dans des bâtiments abandonnés ou réquisitionnés (casernes à Verdun notamment pour le n° 240) mais également dans des prairies, à la belle étoile puis dans des tentes. Les prisonniers n’y restaient que quelques mois (jusqu’en octobre 1940 pour certains Français). À noter que les soldats français d’origine africaine sont restés en France dans certains fronstalags. Les prisonniers de guerre qui y étaient détenus ont été également utilisés par les Allemands pour des travaux dans des entreprises françaises participant à l’effort de guerre allemand, notamment pour construire le « mur de l’Atlantique ».

      Un stalag (Stammlager für kriegsgefangene) était, un camp de prisonniers de guerre pour hommes de troupe et sous-officiers. En fait la plupart des prisonniers de guerre ne passaient que quelques jours au Stalag pour être enregistrés. Ils étaient dirigés rapidement (en moins d’une semaine) sur les détachements de travail (Arb-Kdo: Arbeitskommando) de la zone géographique sous l’autorité du Stalag, dans lesquels ils étaient cantonnés dans des camps (Lager) propres au commando ou regroupant plusieurs commandos. Au Stalag ne demeuraient que les prisonniers de guerre nécessaires au fonctionnement administratif du Stalag et de ses commandos. Où se situaient les stalags ? Voyez l’excellent site suivant : http://www.moosburg.org/info/stalag/laglist.html .
      Les prisonniers de guerre n’étaient pas envoyés dans des camps de concentration mais dans des détachements de travail (Arb-Kdo), ou des camps disciplinaires pour ceux qui avaient tenté de s’évader.

      J’espère avoir répondu à votre attente. Sur notre site vous trouverez des informations et des témoignages sur les conditions de vie et de travail des prisonniers de guerre.

      Cordialement.
      Louis

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